Commémoration du neuvième anniversaire du Discours Royal d’Ajdir et de la création de l’IRCAM

Point de presse
16 Octobre 2010

L’objectif assigné à cette rencontre est la communication et l’interaction positives entre l’IRCAM et son environnement médiatique. La présente rencontre, à l’instar de celles qui ont été organisées à ce jour par l’IRCAM, constitue une opportunité de communication avec l’opinion publique, à travers les médias, dont je salue ici le dynamisme en tant que quatrième pouvoir. Cette allocution focalisera sur les axes suivants : le bilan politique général, la situation de l’amazighité dans l’enseignement et les médias ainsi que dans les domaines des droits linguistiques et culturels, le partenariat, la recherche scientifique et le rayonnement culturel.

 
  • Education et l’enseignement :

D’une manière générale, grâce à la conjugaison des efforts du Ministère de l’éducation nationale, du Conseil Supérieur de l’Enseignement et de l’IRCAM, l’on peut affirmer que la situation de la langue amazighe au sein du système éducatif national, depuis la rentrée scolaire 2003-2004, est totalement différente de la situation antérieure où l’enseignement de la langue amazighe était exclu de l’école marocaine. Concernant l’enseignement scolaire, selon les chiffres donnés par le Ministère de l’éducation nationale, le nombre d’apprenants de l’amazighe est environ de 10 % de l’ensemble des élèves du cycle primaire. Le nombre d’enseignants (non spécialisés) avoisine 12 000 et le nombre de classes dépasse 4000. Au  niveau de l’enseignement supérieur, le nombre des inscrits dans les filières des études  amazighes, au titre de l’année en cours, dépasse les 1000 étudiants au sein des Facultés des Lettres et des Sciences Humaines des Universités Ibn Zohr d’Agadir, Mohammed Ben Abdellah de Fès et Mohammed I d’Oujda. Pour toutes ces considérations, l’on ne peut que saluer cette expérience visant à entériner l’enseignement de la langue et de la culture amazighes au sein de l’école et de l’université marocaines.
Cependant, on ne manquera pas de pointer un certain nombre de contraintes et de lacunes au niveau de la généralisation verticale et horizontale de l’enseignement de l’amazighe puisque tous les élèves et tous les niveaux ne sont pas encore touchés. Relativement aux ressources humaines, un manque a été constaté au niveau des encadrants, des inspecteurs et des enseignants, ce qui implique la nécessité d’accroître les ressources humaines afin de répondre aux besoins. Dans cette perspective, l’Institut Royal de la Culture Amazighe confectionne les supports pédagogiques et élabore les modules de formation des formateurs, des inspecteurs et des enseignants. Il s’acquitte également de son rôle d’intermédiaire vis-à-vis des responsables au niveau de l’enseignement primaire et universitaire. Dans ce cadre, l’Institut a participé à une rencontre, au siège du Ministère, durant laquelle les principales questions en suspens ont été examinées, en présence de M. le Ministre de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur, de la Formation des Cadres et de la Recherche Scientifique, de Mme la Secrétaire d’Etat Chargée de l’Enseignement Scolaire ainsi que des Directeurs centraux. La rencontre a permis d’apprécier la situation et d’apporter des solutions relatives à la réalité de la langue amazighe au sein du système  scolaire national. Il a été convenu que le Ministère prendra les mesures appropriées pour résoudre les problèmes restés en suspens, en l’occurrence la généralisation et la formation des enseignants. La rencontre a aussi permis d’activer la Commission mixte pour qu’elle assure le suivi du processus d’intégration et des actions opérationnelles qui lui sont inhérentes, particulièrement celles ayant trait à la législation et aux ressources humaines, à travers la qualification professionnelle des lauréats des filières des études amazighes.

  • Droits humains :

Au niveau juridique, une grande importance est accordée à la troisième génération des droits de l’homme, spécifiquement les droits linguistiques et culturels, ce qui  est un indicateur fort quant à l’intérêt que porte le Maroc aux droits de l’homme dans leur globalité. L’action commune entre  l’Institut, le Conseil Consultatif des Droits de l’Homme et les organisations de la société civile a permis d’enregistrer des avancées dans un domaine nouveau où le pays occupe une place de choix  parmi les pays qui connaissent la diversité linguistique et culturelle. Dans ce cadre, l’Institut a contribué par le rapport qu’il a adressé au Ministère de la Justice à mettre en relief les réalisations essentielles ainsi que les lacunes à combler, dans la perspective de la mise en œuvre des plans nationaux visant la promotion de la culture des droits de l’homme et leur renforcement. Il ne fait pas de doute que cet objectif ne peut se concrétiser que par la conjugaison des efforts de tous les acteurs institutionnels et associatifs, chacun selon ses prérogatives, ses moyens et son style de travail. Il faut aussi affirmer que le processus de conscientisation  moderniste et engagée connaît une progression au niveau social, ce qui milite en faveur de l’émergence des conditions favorables à la promotion des droits culturels et linguistiques conformément aux dispositions du droit international et aux meilleures pratiques aux niveaux national et international.
Cette conception contribuera certainement au renforcement du front interne à travers la sensibilisation de la société aux contenus du Discours royal d’Ajdir (17 octobre 2010) qui constitue véritablement la base politique et juridique d’une nouvelle politique nationale fondant une conception avancée de la culture nationale plurielle et ouverte sur le monde contemporain, et  au sein de laquelle la culture et la langue amazighes constituent des éléments essentiels.

 

  • Recherche scientifique et rayonnement culturel :

Sur le plan académique, l’Institut Royal de la Culture s’impose progressivement en tant qu’institution de référence dans le domaine amazighe et dans le champ des sciences humaines et sociales, particulièrement dans les champs de la connaissance qui sont en relation avec la langue, les arts, la littérature, l’éducation, la traduction, l’histoire, l’environnement, le patrimoine matériel et les nouvelles technologies. Parmi les indicateurs qui témoignent de la contribution exceptionnelle de cette institution et de l’efficacité de son travail, il y a ce que l’Institut a accumulé dans ce domaine, au niveau qualitatif et quantitatif, à travers un ensemble de recherches, de formations, de colloques, de rencontres scientifiques et de festivals culturels et de rayonnement qu’il a organisés. Autre indicateur révélateur de l’efficacité de l’Institut, le nombre important de ses publications largement diffusées.
Eu égard à ce qui a été réalisé durant une période aussi courte de notre histoire contemporaine, grâce à la volonté politique et à l’engagement de tous les acteurs, nous ne pouvons qu’être optimistes quant à l’avenir de l’amazighité dans notre pays, à condition que soit effectif l’engagement de tous à la réalisation  du chantier de la promotion de l’amazighité en tant que chantier stratégique du Maroc nouveau. Ce chantier, avec d’autres, constitue un levier important pour la démocratisation et le développement du pays. Cependant, l’optimisme ne doit pas exclure la vigilance, d’autant plus que le projet de promotion de l’amazighité fait face à deux dangers qui le guettent : le danger du renfermement identitaire anachronique et le danger de l’exclusion arbitraire et antidémocratique. Ce qui implique que l’avenir de l’amazighité est tributaire du partage des valeurs de la culture moderniste.
Et, pour revenir à l’IRCAM, nous n’avons pas de doute que cette institution citoyenne, avec l’accompagnement effectif des institutions et le soutien critique de la société civile, continuera à œuvrer pour s’acquitter de ses missions politiques et académiques, et de ses fonctions de consultation, de médiation et de force opérationnelle. Il faut, enfin, reconnaître que les réalisations dont nous pouvons nous enorgueillir, quelles soient d’ordre stratégique et politique ou de nature opérationnelle, n’auraient pu voir le jour sans les orientions du Conseil d’administration de l’Institut et sans l’engagement du personnel chercheur et administratif de l’institution.


Ahmed Boukouss
Recteur de l’Institut Royal de la Culture Amazighe