Conseil d'administration de l'IRCAM : L'insertion de l'Amazigh dans les médias s'impose

Le conseil d'administration de l'Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM) vient de se réunir en session ordinaire. Au menu de cette réunion figure en premier lieu l'examen du rapport annuel des activités de l'institut au titre de l'année 2004 aux plans scientifique, financier et administratif. Ce rapport approuvé, le conseil d'administration de l'IRCAM a passé en revue les questions relatives à l'enseignement de l'Amazigh et la place de cette langue dans les média et la communication, d'une façon plus générale.

Ce rapport a valeur de symbole. Il intervient pour faire le bilan de la seconde année d'existence de l'IRCAM et dans une conjoncture marquée par des 'aléas passagers', comme la démission collective de plusieurs membres de l'institution. Sept membres du Conseil d'Administration ont présenté, en effet, leur démission le 21 février dernier, prétextant notamment du fait que la situation de l'amazighité n'a pas évolué et se trouve toujours 'dans son état d'avant 2001', année de création de l'IRCAM.

Parmi les griefs avancés, la situation faite à la langue amazighe dans l'enseignement et le sort fait à Tamazight dans la communication où elle serait ' toujours marginalisée, folklorisée ou exclue'. Dans l'enseignement, les démissionnaires de l'IRCAM affirment ainsi qu''aucune logistique fiable ( formation des enseignants, moyens pédagogiques, moyens matériels...) n'a été mise en place'. Au niveau de l'université, est-il encore ajouté, 'la réforme de l'enseignement supérieur ne réserve aucune place à l'amazigh'. La liste est encore longue des réserves émises par les membres de l'IRCAM qui ont présenté leur démission.

Le conseil d'administration de l'IRCAM au bout de ces deux années d'activité ne cache pas les difficultés inhérentes à sa mission. C'est ainsi que, dans le rapport d'activités 2004, il est question aussi bien des réalisations que des difficultés de mise en œuvre des dispositions prises, particulièrement dans l'enseignement de la langue amazighe. Au chapitre des réalisations, l'IRCAM a édité le manuel pour la seconde année de l'enseignement fondamental comprenant le livre de l'élève et le guide du maître, comme il a publié un manuel d'initiation à l'amazighe.

l'Institut a également assuré la formation d'inspecteurs et de maîtres dans les domaines de la langue, de la graphie, de la pédagogie et de la didactique de l'amazighe. Dans son rapport l'IRCAM note que ' l'un des principaux problèmes rencontrés par l'enseignement de l'amazighe consiste en la diffusion du manuel qui n'a pas été généralisée à toutes les écoles où l'amazighe est enseigné.

Par ailleurs, la formation de base au profit des inspecteurs et des enseignants n'a pas été assurée dans certaines académies ; de même que la formation continue n'a été organisée que dans quelques académies.' Pour faire face à ces difficultés dans l'avenir, l'IRCAM propose 'la réactivation de la Commission mixte IRCAM-MEN', la seule à même d'assurer le suivi des progrès réalisés et susceptibles d'aplanir les difficultés pouvant surgir devant l'enseignement de la langue amazighe dans les écoles.

L'autre chantier qui pose problème est 'l'insertion de l'amazighe dans le champ médiatique', plus spécifiquement audiovisuel. L'IRCAM a élaboré sa stratégie concernant la question mais insiste sur le fait qu'il n'a pas été 'sollicité en tant que partenaire' mais intervient en tant que consultant pour la validation des projets sur l'amazighe.L'IRCAM insiste encore sur le fait qu'il n'est 'ni producteur ni réalisateur' comme 'il n'est pas encore associé par un protocole de coopération à la Haute Autorité de l'Audio-visuel' et 'entretient de faibles relations avec le secteur privé dans le contexte de la libéralisation du champ médiatique'.

Le bilan dans la recherche-action aligne plusieurs réalisations comme la publication d'une vingtaine ouvrages, l'important travail de standardisation de la langue dans les domaines du lexique et de la grammaire, la codification et le codage de la graphie tifinaghe auprès de l'Organisation ISO-Unicode, la collecte, l'inventaire et l' étude de la tradition orale en littérature, les recherches sur le patrimoine historique, le manuscrit amazighe, la toponymie, en histoire, la recherche sur les structures sociales, en anthropologie, la traduction vers l'amazighe du patrimoine littéraire mondial et traduction d'ouvrages de référence sur la société et la culture amazighes et, enfin, les études sur la situation de la presse d'expression amazighe.

En deux ans d'existence, l'IRCAM n'a peut être pas imposé une visibilité plus importante de la langue et de la culture amazighe dans des institutions comme l'éducation nationale, l'état civil, les médias...mais les faits sont là qui montrent que la phase de démarrage a enregistré de notables avancées.

Les bases de l'édifice ne sont pas encore achevées et le rapport 2004 présenté à la réunion du Conseil d'Administration fait une évaluation critique du chemin parcouru comme il suggère des pistes à explorer et des correctifs à apporter à l'action engagée.

Par Abdallah Bensmain
Le Matin