Raconte-moi une histoire

Présentation du livre « Raconte moi ton histoire. Handicap : le courage d’en parler »  co-écrit par Fatima Lemrini El Ouahabi (Médecin ophtalmologiste, membre fondateur et présidente de l’Association Marocaine des Déficients Moteurs) et Mohamed Hamadi Bekouchi (sociologue).

Ce livre est une sélection de récits de vie qui permet de capter les lueurs d’espoir au-delà des statistiques et de l’état déplorable du système public de prise en charge de la santé et de l’éducation, en général, et de l’insertion des personnes handicapés plus spécifiquement.

Tout au long de l’ouvrage on peut lire des encadrés comportant des données médicales complémentaires sur les causes et apparitions des handicaps ainsi que des analyses sociologiques.

Les deux auteurs captent des moments de souffrances, de lutte mais aussi de joie et parfois de peine. Il rend compte d’une partie de la réalité pour montrer l’un des tabous de notre société sans tomber dans le voyeurisme.

 

En voici quelques extraits :

Sa mère raconte : « Hamada  a été placé à l’Hôpital d’Enfants de Rabat où, suite à une manipulation rapide et inadéquate de la part d’un pédiatre stagiaire, son bras droit a été fracturé. Au lieu de s’excuser, au moins, ce dernier nous a dit avec arrogance que ‘de toute manière, Hamada ne survivrait pas’.

Un professeur a pris la relève et nous nous sommes dit que notre fils allait être examiné et suivi par un professionnel confirmé. […]

Un jour, ce professeur s’est confessé à nous en nous assurant que lui-même ne comprenait pas les troubles que présentait notre enfant. Il a même insinué qu’ils relevaient probablement du surnaturel et nous a conseillé de faire appel aux guérisseurs traditionnels. Nous étions sous le choc : de telles croyances charlatanes de la bouche même d’un illustre homme de sciences ? » p. 143

 

Dans un autre récit, la mère de Mohamed Amine  raconte :

« Il s’est désinvesti de ses responsabilités de mari et de père sans honte ni remords. De par sa fuite, il voulait marquer ma soi-disant ‘culpabilité’ de lui avoir donné un fils handicapé. Il s’en est d’ailleurs tellement désinvesti que, tout fonctionnaire qu’il était, il n’a jamais voulu déclarer le handicap de notre fils, le privant ainsi de tous ses droits médico-sociaux que la loi marocaine met à disposition dans de tels cas sur simple déclaration d’enfant handicapé à charge, et ce, à vie ! » p.266.

 

« Une chose qui ne m’était jamais venu à l’esprit m’attendait pourtant au détour de mon triste sort. C’était mon ‘Mektoub’, comme diraient les gens en général, quels que soient leurs niveaux socio-économique, culturel ou autres. Moi, j’appelerais ça ‘ironie du sort’ ! En fait, il est tout simplement et bêtement arrivé que mon mari tombe gravement malade et perde brutalement et totalement la vue. Le voilà donc, tout Pharaon qu’il était du haut de sa pyramide, devenu dépendant ! L’audace ne connaissant pas la grâce, c’est avec arrogance qu’il m’a envoyé un émissaire proclamant mon retour immédiat au domicile conjugal !

 

Comme je vous l’ai déjà dit, nous n’étions pas divorcés. Et la loi étant la loi, elle était bel et bien de son côté ! Elle m’obligeait à rentrer docilement audit domicile conjugal pour prendre personnellement soin de mon prétendu mari et père de mon enfant, malgré toute la répulsion que j’avais envers lui. […] Sitôt guéri et sur pieds, ses sales habitudes et son odieux caractère ont tout de suite refait surface et il s’est remis à me traiter avec toute la violence inhumaine dont il était si bien capable. » p. 268.

 

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[1] Ce livre, qui comporte 290 pages, a été publié en 2018 aux Editions Dar Assalam à Rabat.

 

[1] Hadama, né en 1984 souffre d’une déficience mentale modérée à sévère.

 

[1] Mohamed Amine a 8 ans et souffre d’un polyhandicap.