Célébration du Nouvel An Amazighe 2967

Célébration du Nouvel An Amazighe 2967

Argumentaire: Parallèlement à la disparition d’un ensemble important de pratiques culturelles et artistiques dans les communautés locales, d’autres ont été mobilisées et investies dans la renaissance culturelle, revêtant d’autres fonctions et significations. La nouvelle configuration lexicale et cérémonielle de l’ⵉⴹ ⵏ ⵉⵏⵏⴰⵢⵔ en constitue un exemple illustratif. Cette fête d’origine agraire est aujourd’hui une réalité sociale et médiatique incontournable. Célébrée aussi bien par les acteurs de la société civile et les partis politiques que par les institutions officielles, elle commence même à se constituer en objet de revendication politique, défendue comme une fête nationale et jour férié, et ce depuis l’institutionnalisation en 2001 de la culture amazighe et sa constitutionnalisation en 2011. C’est en ce sens qu’il importe, quand on évoque cet événement, de distinguer son origine agraire de sa version socialement construite de nouvel an amazighe.

Innayer ⵉⵏⵏⴰⵢⵔ se présente habituellement comme un rite inscrit dans le calendrier agraire et ses activités saisonnières. Il est fêté dans la majorité des régions, au Maroc et dans les autres pays de l’Afrique du Nord, depuis des temps immémoriaux. Appelé suivant les régions ⵉⴹ ⵏ ⵓⵙⴳⴳⵯⴰⵙ (la nuit de l’année), ⵉⴹ ⵏ ⵉⵏⵏⴰⵢⵔ (la nuit de janvier), hagouza, ⵜⴰⴳⵯⵍⵍⴰ ⵏ ⵉⵏⵏⴰⵢⵔ (bouillie de janvier), ⵜⴰⴱⴱⵓⵔⵜ ⵏ ⵓⵙⴳⴳⵯⴰⵙ (la porte de l’année en Kabylie)…, il est commémoré, comme cérémonie domestique et familiale, par la préparation de mets spéciaux (couscous aux sept légumes, bouillie etc.), par l’organisation de certains rituels d’appel et de passage et/ou par l’observance de certains interdits qui portent des significations différentes. Sa célébration est très ancienne et les coutumes qui la marquent varient d’une région à une autre.

Mais la célébration actuelle de l’événement fait également partie intégrante des processus de reconstruction identitaire, engagés par le mouvement d’affirmation des Amazighes, qui consiste, en tant que mode opératoire propre à tous les mouvements de construction des identités collectives, en la conversion de certains matériaux des pratiques culturelles traditionnelles en marqueurs identitaires pour la revalorisation de l’identité affirmée.  Le nouvel an est ainsi consacré  au Maroc, en Algérie et en Libye  et au sein des diasporas depuis au moins le début des années 1970, coïncidant avec la prise de conscience identitaire. L’an 950 avant Jésus-Christ, correspondant à l’arrivée de Chichonq Ier au pouvoir en Egypte, fondateur de la 22ème dynastie pharaonique, a été choisi comme début de datation, et ce pour marquer la profondeur historique de la présence amazighe et son antériorité.